Limites de capture pour 2017 : Il est temps que les ministres de l'UE cessent de jouer avec la reconstitution des stocks

Des pêcheries bien gérées sont porteuses d'avantages environnementaux, économiques et sociaux  

Limites de capture pour 2017 : Il est temps que les ministres de l'UE cessent de jouer avec la reconstitution des stocks
Polish fisherman

© Corey Arnold

Lorsqu'il s'agit de fixer les limites de capture, les ministres de la Pêche de l'Union européenne prennent encore trop souvent des risques par rapport aux stocks, aux données scientifiques ou aux lois en vigueur, comme le montrent les résultats de la réunion du Conseil du mois d'octobre. Avant la fin 2016, le Conseil prendra deux autres décisions majeures concernant les limites de capture annuelles. Quels en sont les enjeux ?

Les bénéfices de l'élimination de la surpêche sont évidents. Un rapport récemment élaboré par le cabinet de consultants britannique, Poseidon Aquatic Resource Management Ltd., met en lumière cinq études de cas montrant que lorsqu'un stock est pêché dans des limites durables dans les eaux de l'UE, l'écosystème, les armements de pêche et les collectivités côtières en tirent des bénéfices. De telles perspectives ainsi que l'échec de la mise en œuvre d'une pêche durable au cours des décennies précédentes ont poussé les décisionnaires de l'UE à s'engager à appliquer la réforme de la Politique commune de la pêche de 2013, visant à mettre un terme à la surpêche dans des délais précis. 

Si les ministres se disent souvent favorables à ces principes, ils finissent généralement par céder aux pressions politiques à court terme qui les poussent à ignorer les données scientifiques ou à retarder l'application de la réglementation. Parfois, les ministres considèrent les avis scientifiques concernant la limite supérieure de capture d'un stock comme la première enchère de ce qui devient très vite une négociation sur le dos de la nature, où on prend de l’ avance sur les captures de demain aux dépens de la reconstitution des stocks sous prétexte que cela est bon pour l'économie de la pêche.

Même lorsque les nouvelles sont plutôt bonnes – par exemple, lorsque, ces dernières années, on a vu poindre un début de reconstitution des stocks de cabillaud en mer du Nord – les ministres s'empressent souvent d'autoriser la pêche à son niveau maximum. Or, il y a de fortes chances pour que cette évolution favorable des stocks soit annihilée avant même que la filière pêche et les consommateurs aient eu le temps d'en recueillir les fruits.

Les prochaines réunions du Conseil seront l'occasion de changer les choses. Mi-novembre, les ministres se prononceront sur les limites de capture pour les deux prochaines années sur les stocks en eaux profondes, particulièrement vulnérables à la surexploitation, en raison d'une croissance lente et d'une maturité sexuelle tardive. Ce processus de négociations sera suivi par une réunion du Conseil encore plus importante en décembre ; les ministres débattront des 100 limites de captures restantes pour les stocks de l'Atlantique et de la mer du Nord.

Bien sûr, dans leurs déclarations à la fin de chaque séance de négociation nocturne, les ministres ne précisent jamais l’ampleur des risques pris en matière de reconstitution des stocks. Les compromis auxquels ces séances aboutissent sont souvent qualifiés de « progrès », bien que les données publiées ensuite par la Commission européenne prouvent le contraire. Ce décalage est en grande partie dû au manque de transparence du Conseil. En effet, il peut s'écouler des semaines, voire des mois avant que l'on ne sache précisément ce qui a été décidé.

Les organisations non gouvernementales ont demandé que les discussions du Conseil du mois de décembre soient diffusées en ligne pour que les citoyens européens puissent exiger des ministres qu'ils rendent compte de leurs décisions. Mais le refus opposé à plusieurs reprises à ces demandes démontre que les ministres préfèrent continuer à autoriser la « surpêche dissimulée », pour réemployer l'expression utilisée dans un rapport élaboré par Transparency International.

Les recommandations scientifiques délivrées par le Conseil international pour l'exploration de la mer (CIEM) pour la plupart des stocks dont il est question sont disponibles sur le site Internet du CIEM depuis plusieurs mois.  Malgré cela, les délégations des États membres arrivent souvent aux réunions du Conseil avec leurs propres versions non officielles des « recommandations scientifiques » pour étayer la phase finale des débats. Cette pratique a souvent donné lieu à des négociations prolongées.

Pour ceux qui connaissent bien ces procédures opaques, les discussions nocturnes sont souvent le signe que les négociations passent outre les données scientifiques et outre les propositions faites par la Commission européenne et qu'il s'agit tout bonnement de marchandage. Les données scientifiques et les lois devraient suffire à orienter les décisions des ministres de la pêche de l'UE. Il est de la responsabilité des ministres d'expliquer leur position par rapport aux grands objectifs de la réglementation qu'ils ont approuvée, mais aussi d'expliquer ce qu'ils ont fait pour en garantir l'application.

Andrew Clayton dirige les efforts de The Pew Charitable Trusts pour mettre fin à la surpêche dans le Nord-Ouest de l'Europe.

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