Pour la Journée mondiale du thon, état des lieux des avancées et des problèmes constatés pour le poisson le plus consommé de la planète

Seule une adhésion planétaire aux politiques fondées sur la science peut aider à assurer la conservation des thons

Pour la Journée mondiale du thon, état des lieux des avancées et des problèmes constatés pour le poisson le plus consommé de la planète
World Tuna Day

La bonite à ventre rayé et le thon albacore font partie des espèces recherchées de l'océan Pacifique.

© Richard Hermann

Les thonidés sont des espèces remarquables dont le corps en forme de torpille leur procure rapidité et endurance. Le thon rouge peut se déplacer jusqu'à plus de 70 km/h, plonger à plus de 1200 mètres et vivre jusqu'à 40 ans. Certaines espèces peuvent dépasser les 680 kg. Le thon albacore est scrupuleusement fidèle à son banc, et la plupart des espèces de thons sont à sang chaud.

Les thonidés sont également des espèces commerciales vitales ; notamment le thon rouge, qui est hautement recherché pour la confection des sushis, et la bonite à ventre rayé et le thon albacore, qui sont abondamment pêchés pour répondre à la demande mondiale de thon en conserve abordable. À elles seules, sept espèces de thons génèrent 38,7 milliards d'euros de vente au détail annuellement.

C'est notamment pour ces raisons qu'en 2016 les Nations Unies ont décrété le 2 mai Journée mondiale du thon afin de suivre l'exemple des huit États insulaires du Pacifique qui ont lancé cette tradition en 2011. Ces États, qui abritent les réserves de thon parmi les plus importantes au monde, se sont regroupés au sein de l'accord de Nauru (PNA), qui établit des règles en matière de pêche dans leurs eaux.

Consacrer une journée au thon est tout à fait pertinent : la plupart des gens en consomment ou en retrouvent sur leur menu. Du thon rouge de l'Atlantique et du Pacifique servi dans les restaurants de sushis haut de gamme à la bonite à ventre rayé et au thon albacore en conserve des supermarchés en passant par le thon frais du poissonnier, les thonidés se retrouvent dans toutes les cultures et dans le monde entier, et constituent une source importante de protéines pour des millions de personnes. 

Ce qui ne va pas : le thon rouge du Pacifique en voie d'extinction

Malheureusement, la forte demande de thon a entraîné des crises pour certaines espèces. Neuf des vingt-trois stocks, ce qui représente 39 % de tous les thons, font l'objet d'une surpêche. La pêche non durable a entraîné une baisse importante de certaines populations, et pourrait même entraîner l'extinction du thon rouge du Pacifique.

Les stocks de thon rouge du Pacifique se sont effondrés pour atteindre seulement 2,6 % de leurs niveaux historiques, et les quotas n'ont pas permis de mettre fin à la surpêche. Cette situation est largement attribuable à l'incapacité de la Commission interaméricaine du thon tropical et la Commission des pêches du Pacifique central et occidental de prendre les mesures nécessaires pour préserver ces stocks. Une gestion judicieuse nécessiterait notamment de réduire drastiquement les quotas pour permettre aux stocks de se rétablir. Les deux commissions étant restées sourdes aux avis scientifiques, la surpêche ne faiblit pas.

C'est la raison pour laquelle The Pew Charitable Trusts et ses partenaires exigent un moratoire de deux ans sur la pêche commerciale du thon rouge du Pacifique. Un moratoire mettrait un terme à la surpêche immédiatement et aiderait à rétablir les stocks. 2017 sera une véritable année test pour la gestion du thon rouge du Pacifique : sans un moratoire, ou du moins des quotas de pêche efficaces, la seule solution pour sauver l'espèce pourrait être un embargo commercial international.

Ce qui va : le leadership des États du Pacifique et l'amélioration de la gestion dans l'Atlantique

Dans les eaux visées par l'accord de Nauru, la bonite à ventre rayé est reine et n'a jamais été surexploitée, en partie parce qu'elle se reproduit rapidement. Les États liés par l'accord de Nauru travaillent à l'élaboration d'un nouveau système, appelé stratégies de prise, de gestion de la bonite à ventre rayé dans leurs eaux et au-delà. Ce système doit comporter un ensemble de règles préétablies énonçant les mesures à prendre en cas de déclin débutant de l'espèce. L'objectif poursuivi est de créer un système de gestion proactive avant que la bonite à ventre rayé ne devienne surexploitée. Le fait d'avoir instauré des stratégies de prise peut permettre d'éviter de se retrouver dans une impasse politique, problème qui vient souvent entraver la gestion efficace des stocks.

Une grande partie des bonites à ventre rayé sont pêchées par des senneurs à l'aide de dispositifs de concentration des poissons (DCP), des systèmes flottants permettant de capturer des espèces marines en grand nombre. Bien qu'ils aient été conçus pour pêcher la bonite à ventre rayé, les DCP sont partiellement responsables du déclin important du thon obèse, dont seuls 20 % de la population d'origine subsiste dans le centre et l'ouest de l'océan Pacifique.

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Les DCP peuvent être faits de différentes matières et sont déployés par des bateaux senneurs, qui les utilisent pour capturer les poissons.

© The Pew Charitable Trusts

Pour mieux comprendre l'importance et l'impact des DCP, les États liés par l'accord de Nauru n'ont pas hésité à recourir aux technologies modernes, comme le suivi électronique des DCP, pour recueillir des données en quasi-temps réel permettant d'informer les responsables des ressources halieutiques et les autorités chargées de la répression en cas d’infractions . Ces États sont ainsi devenus la première autorité à surveiller l'utilisation de tous les DCP utilisés dans ses eaux.

La Commission internationale pour la conservation des thonidés de l'Atlantique (CICTA) utilise également les avancées technologiques pour améliorer la gestion des ressources halieutiques, par l'adoption d'un système complet de suivi électronique des prises et du commerce du thon rouge de l'Atlantique visant principalement à combler les vides juridiques et empêcher la pêche illégale. Cette espèce est très recherchée partout dans le monde pour la confection de sushis et de sashimis, mais principalement au Japon.

Ce système est seulement un exemple des mesures positives adoptées par la CICTA au cours des dernières années. Par-dessus tout, la CICTA s'est également engagée à favoriser la transition vers des stratégies de prise plus efficaces et durables pour les stocks prioritaires, notamment le thon rouge et le thon tropical. Pour démontrer leur détermination à adopter une gestion efficace des ressources halieutiques, les responsables de la CICTA se sont engagés à respecter le délai de cinq ans qu'ils se sont fixés en 2016.

La CICTA doit respecter ses engagements fondés sur la science

Bien que les responsables de l'Atlantique fassent des efforts en matière de gestion, la dernière réunion de la CICTA a fait état d'un recul des stocks de thon rouge de Méditerranée et de l'Atlantique Est. Après une réduction des quotas de pêche en 2009 pour ces espèces, mesure qui a entraîné une hausse quasi immédiate des stocks et qui a été saluée par une commission indépendante. La CICTA a changé son fusil d'épaule en 2016 en adoptant une hausse des quotas supérieure à ceux recommandés par les scientifiques. Cette décision constitue un retour aux processus décisionnels risqués qui ont gangrené la CICTA pendant des décennies. Si en 2017 la commission ne change pas de cap afin de respecter son engagement à tenir compte des avis scientifiques concernant le thon rouge de l'Atlantique, la surpêche risque de refaire son apparition.

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Le thon rouge de l'Atlantique est une espèce migratrice de grande taille que l'on retrouve dans l'océan Atlantique Est et Ouest et dans la mer Méditerranée.

© Manfred Bortoli

Tournons-nous vers l'avenir

En dépit d'une gestion inadéquate de certaines espèces de thons, en particulier le thon rouge du Pacifique, les progrès accomplis sont globalement prometteurs pour toutes les espèces de thons. En adoptant des politiques judicieuses et prudentes, les responsables des ressources halieutiques pourront améliorer la situation de ce magnifique poisson et nous communiquer de meilleures nouvelles à relayer l'an prochain lors de la Journée mondiale du thon.

Lorsque vous vous attablerez devant un repas de sushis ou que vous attaquerez votre sandwich au thon, réfléchissez à la provenance de ce poisson et à ses impacts culturels et économiques. Cette journée ne concerne pas uniquement les pêcheurs de thon et les pays où elle se pratique, mais tous ceux qui ont à cœur la pêche durable et la santé des océans.

Amanda Nickson est responsable de la préservation du thon au niveau mondial pour The Pew Charitable Trusts.

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