Voyage sur le Pacifique
À BORD DU NAVIRE OCÉANOGRAPHIQUE BRAVEHEART – Nous avons gagné la pleine mer aussitôt après notre départ du port de Tauranga en Nouvelle-Zélande.
Nous avons mis le cap sur la Polynésie française et nous devons nous attendre à ne plus revoir la terre avant plusieurs jours. Alors que je me trouve cernée de tous côtés par l’océan, les périples d’autres navigateurs dans l’océan Pacifique me reviennent à l’esprit.
Il y a de ça plusieurs siècles, les explorateurs européens étaient étonnés en atteignant ces îles isolées de les trouver habitées – par des gens qui pourtant ne connaissaient pas la boussole et qui n’utilisaient ni ne comprenaient les méthodes européennes de navigation.
Le capitaine James Cook, qui explora ces eaux au 18e siècle, aborda un grand nombre d’îles du Pacifique Sud, y compris la Nouvelle-Zélande. Il remarqua des similitudes dans les langues parlées et en déduisit qu’il devait y avoir des connexions entre ces populations.
Parlant avec des Tahitiens, Cook les interrogea sur leurs méthodes de navigation. Il découvrit que les Polynésiens étaient parfaitement expérimentés dans ce domaine et qu’ils étaient capables de lui donner les indications nécessaires pour atteindre différentes îles situées loin de là.
De nos jours, nous en connaissons plus que Cook sur les déplacements des peuples polynésiens, ainsi que sur les connexions culturelles et linguistiques qui en résultèrent dans tout le Pacifique.
Les pirogues traditionnelles Hokule’a et Hikianalia à l’ancre dans le port de Papeete en Polynésie française. Photo: Jérôme Petit/The Pew Charitable Trusts
Nos connaissances modernes sur la navigation polynésienne n’ont commencé à s’enrichir qu’au début des années 1970, à Hawaï, avec la création de la Polynesian Voyaging Society. Ses membres entreprennent alors de voyager à la manière des anciens Polynésiens en navigant sur une embarcation traditionnelle entre Hawaï, la Polynésie française, Rapa Nui (Île de Pâques) et Aotearoa (Nouvelle-Zélande).
En 1973, ils testent la version récemment construite d’une pirogue traditionnelle à voile et à double coque, baptisée Hokule’a. Ce premier trajet aller-retour réussi entre Hawaï et la Polynésie française démontre qu’il était possible de naviguer avec précision en se basant uniquement sur le soleil, la lune et les étoiles.
En 1985, Hokule’a atteint la Baie des Îles d’Aotearoa. Cette visite inspire la mise en chantier d’une autre embarcation traditionnelle, baptisée Te Aurere. En 2012, Te Aurere et un deuxième waka, ou pirogue traditionnelle, baptisé Ngahiraka Mai Tawhiti, partent de Nouvelle-Zélande pour rejoindre Rapa Nui.
Tout comme notre expédition, l’objectif de ce voyage était de mettre en exergue les forts liens océaniques et culturels entre la région des Kermadec en Nouvelle-Zélande, la Polynésie française et Rapa Nui. Ce sont là des étendues océaniques connectées et spéciales que Pew Charitable Trusts s’efforce de protéger en partenariat avec les populations et gouvernements locaux.
Au début de cette année, la Polynesian Voyaging Society s’est lancée dans un périple de trois ans autour du monde baptisé « Malama Honua », ce qui signifie « prenons soin de notre Terre ».
La première étape que s’est fixée l’équipage a consisté à rallier la Polynésie française à partir d’Hawaï.
L’accueil réservé à Tahiti était chaleureux et le message a été entièrement adopté par les Amis d’Hokule’a à Tahiti.
Il me tarde, dans les traces d’Hokule’a, d’explorer les eaux de la Polynésie française afin de mieux connaître et comprendre les connexions marines présentes dans le Pacifique.
Basée à Wellington, Nouvelle-Zélande, Amelia Connell travaille sur la campagne Héritage Mondial des Océans de Pew en vue d’établir une réserve marine dans les îles Kermadec.